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Séminaire du CESDIP

18 décembre 2018 @ 10 h 00

 

Gilles Chantraine est sociologue, chargé de recherche au CLERSE – CNRS / Université de Lille. Ses travaux se consacrent à l’analyse des transformations contemporaines des prisons. Il est notamment l’auteur de Par-delà les murs (PUF, 2004), et, avec Jean Bérard, de 80 000 détenus en 2017 ? (2008, Amsterdam), et Bastille Nation, French Penal Politics and the Punitive Turn (2013, Red Quill Books). Il a récemment dirigé, avec Tomas Martin, Prison Breaks, Toward a Sociology of Escape (2018, Palgrave).

David Scheer est docteur en criminologie. Il travaille actuellement au Centre de Recherche Pénalité, Sécurité et Déviances de l’Université Libre de Bruxelles (CRPSD, Belgique). L’orientation principale de ses travaux consiste à mener une sociologie de la prison au travers d’une méthodologie essentiellement ethnographique, en abordant des thématiques carcérales variées :  les prisons pour mineurs, l’architecture pénitentiaire, le métier de directeur de prison, les trajectoires de sorties de délinquance ou la prise en charge pénitentiaire des détenus « terroristes ». En 2017/2018, il participe à une recherche relative aux « quartiers d’évaluation de la radicalisation » au sein des prisons françaises (Centre lillois d’Etudes et de Recherches Sociologiques et Economiques, sous la direction de Gilles Chantraine).

 Enquêter dans les quartiers d’évaluation de la radicalisation. Méandres du terrain et principaux résultats

Cette communication prend pour cadre une recherche récente (2018) relative aux « quartiers d’évaluation de la radicalisation » (QER) au sein des prisons françaises, basée sur une méthodologie de type ethnographique – immersions longues, entretiens compréhensifs, analyse documentaire –, et rendue possible par l’élaboration d’une convention de recherche entre la direction de l’administration pénitentiaire et le CNRS. Le rapport de recherche « Enquête sociologique sur les quartiers d’évaluation de la radicalisation (QER) », comme son nom l’indique, ne porte pas sur l’ensemble des réponses législatives face au terrorisme mais tente d’analyser une petite partie de ces conséquences : celle qui concerne la gestion des prisons en général et, plus particulièrement, la mise en œuvre et le fonctionnement des QER. Pierre angulaire de la gestion des détenus dits « radicalisés » en prison, les QER reposent sur le principe d’une évaluation des détenus par une équipe pluridisciplinaire dans le cadre de sessions successives à durée déterminée en vue de la construction progressive de synthèses d’évaluation permettant une affectation ultérieure des détenus en détention.
Cette communication porte à la fois sur les principaux résultats de recherche, et sur les coulisses de sa négociation et de sa mise en œuvre. 1/ Elle visera d’une part à décrire et à comprendre comment les QER ont été élaborés, comment la cohérence interne du dispositif a été pensée et comment les acteurs, depuis les positions et les statuts qui sont les leurs, donnent sens au dispositif ; aussi, et plus largement, elle sera l’occasion de décrire le fonctionnement concret des QER au quotidien et la manière dont les rapports sociaux s’y organisent. 2/ D’autre part, cette communication s’intéressera aux enjeux éthiques et déontologiques de l’enquête, ainsi qu’aux enjeux de surveillance des chercheurs et des efforts institutionnels pour contrôler leurs données et leurs interprétations scientifiques. Dans un contexte de prolongation de l’état d’urgence, d’accroissement des pouvoirs des services de renseignement en matière de lutte antiterroriste, et d’accroissement conjoint de la pression institutionnelle sur des professionnels paniqués à l’idée que leur responsabilité soit mise en jeu lors d’un drame toujours potentiel, les modalités (polymorphes) de surveillance et de contrôle du travail des chercheurs – qu’elles soient avérées, soupçonnées ou fantasmées – structurent le travail de récolte, d’analyse et de restitution des données, et doivent faire l’objet d’un retour réflexif approfondi qu’il s’agira de présenter lors de ce séminaire.

 

Guillaume Périssol est enseignant-chercheur en histoire à l’École nationale de protection judiciaire de la jeunesse du Ministère de la Justice et chercheur associé au CESDIP. Il a précédemment enseigné au Département des Sciences de l’éducation de l’Université Paris 8-Vincennes-Saint-Denis et exercé comme conservateur à la Bibliothèque historique de la Ville de Paris. Développant une approche pluridisciplinaire et comparatiste de la délinquance juvénile, de la protection de l’enfance et de l’éducation, il a été accueilli comme chercheur invité à l’Université Harvard en 2012. Sa thèse de doctorat en histoire, soutenue à Sorbonne Université, s’intitule : Le droit chemin : jeunes délinquants en France et aux États-Unis au milieu du XXe siècle. Il est membre des comités de rédaction de la Revue d’histoire de l’enfance « irrégulière » et de la revue Sociétés et jeunesses en difficulté.

Généalogie du contrôle : les apports d’une histoire comparée franco-américaine de la délinquance juvénile au XXe siècle

« La miséricorde ne se commande pas, Elle tombe comme la douce pluie du ciel ». Cette citation de Shakespeare sert encore dans les années 1950 de devise au Tribunal pour enfants de Boston. À la fonction traditionnellement répressive du droit, elle tend à substituer une fonction idéologique sous l’expression de l’amour. Le modèle américain de la juvenile court, saturé d’idéaux de compassion et de réhabilitation, connaît un succès mondial depuis la création à Chicago, en 1899, du premier tribunal pour enfants. Que cachent le progressisme des juvenile courts et le « néohumanisme judiciaire » vanté par le juge Jean Chazal après l’ordonnance de 1945, qui constitue le véritable acte de naissance des tribunaux pour enfants en France ? Que signifie le succès très rapide des tribunaux pour enfants aux États-Unis, en Europe et dans le monde ?

La comparaison de deux pays occidentaux, reliés entre eux, aide à répondre à ces questions, venant combler un vide historiographique et permettant de mieux comprendre le système de la justice des mineurs et le phénomène de la délinquance juvénile. Tout en envisageant le sujet dans la longue durée du XXe siècle, on concentrera l’analyse sur la période qui suit la Seconde Guerre mondiale, car se posent alors de manière particulièrement aiguë des questions sur l’autorité et l’éducation dans un contexte de paniques internationales autour de la délinquance juvénile.

L’intervention s’appuiera sur les derniers travaux de recherche de Guillaume Périssol, qui s’inscrivent dans un champ interdisciplinaire, au croisement de l’histoire de la jeunesse et de l’histoire de la justice et du contrôle. Elle mettra en valeur des archives inédites, comme les dossiers des tribunaux pour enfants de Boston et de la Seine, traités à la fois qualitativement et quantitativement.

 

 

 

 

Détails

Date :
18 décembre 2018
Heure :
10 h 00
Catégorie d’évènement:
Étiquettes évènement :
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Site :
www.cesdip.fr

Organisateurs

Mathilde DARLEY
Bénédicte LAUMOND
FISCHER Nicolas
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